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Qui les radios ont-elles le plus invité le matin au 1er trimestre 2016?

Dernière actualisation : 20/04/2016, 23:12

Voici le top des invités du matin à la radio, ceux et celles qui ont été interviewés au moins 4 fois au 1er trimestre 2016 par Thomas Sotto, Jean-Pierre Elkabbach, Jean-François Achilli, Léa Salamé, Patrick Cohen, Jean-Jacques Bourdin et Olivier Mazerolle. Ce classement s’appuie sur l’analyse des 432 créneaux d’interviews du matin sur Europe 1, France Info, France Inter, RMC et RTL. Il est composé de 21 hommes et de 5 femmes. Ensemble, ils ont rempli 30% des 432 créneaux d’interviews du matin du 1er trimestre 2016.

Ce trimestre fut un temps de crise pour le Gouvernement avec la déchéance (avortée) de nationalité et la loi Travail. Il vient après la crise des attentats de novembre 2015 et la campagne des régionales, marquée par la perspective de plusieurs victoires du FN. Les crises se succèdent, mais d’un trimestre à l’autre, le top des invités du matin a enregistré de grands changements.

Un classement presque sans tête d’affiche

Au 1er trimestre 2016, les têtes d’affiche ont presque disparu des interviews matinales des radios, comme si elles menaient une cure d’abstinence avant le marathon des présidentielles, alors même que le pays se déchirait sur une réforme essentielle et une réforme symbolique.

François Hollande, qui s’était invité deux fois à la radio au 4ème trimestre 2015, n’a donné qu’une seule grande interview radio : c’était le soir depuis Bruxelles, à la sortie d’un Conseil européen et avant de s’envoler pour une longue escapade dans l’hémisphère sud.

Invité plus régulier des matinales, Manuel Valls est passé de neuf à quatre interviews d’un trimestre à l’autre. Autant il avait mouillé la chemise après les attentats et contre le FN, autant il s’est réveillé bien tard à propos de la loi Travail : trois des quatre interviews ont eu lieu pendant la seconde moitié de mars 2016. Les deux autres têtes d’affiche socialistes sont, elles aussi, très discrètes le matin : une seule interview pour Martine Aubry et trois interviews pour Emmanuel Macron sur l’ensemble du 1er trimestre 2016.

La même discrétion à droite et au FN

La même discrétion s’applique aux poids lourds des Républicains. Aucune interview du matin pour Nicolas Sarkozy alors qu’il marquait quasiment Manuel Valls à la culotte, fin 2015, pendant les régionales avec cinq interviews. Seulement deux interviews du matin pour Alain Juppé. C’était début janvier sur Europe 1, à l’occasion de la sortie de son deuxième opus programmatique. Alain Juppé a, depuis, disparu des radios. Quant à François Fillon, après avoir creusé son sillon avec son livre et sept interviews au 4ème trimestre 2015, il veut maintenant casser la baraque. Mais il n’a donné, ce trimestre, que quatre interviews du matin.

Marine Le Pen pratique, elle aussi, l’abstinence médiatique avec une seule interview du matin au 1er trimestre 2016, contre six interviews au 4ème trimestre 2015. Il est vrai qu’elle était alors candidate dans la grande région nord, les nouveaux « Hauts de France »,  et qu’elle cherche probablement, en disparaissant, à préparer son retour avec un nouveau costume, celui de candidate à la présidentielle.

Quarté de tête: des Socialistes qui n’impriment pas.

On a compris. Les poids lourds jouent aux abonnés absents. Mais alors, qui trustent les invitations aux interviews du matin sur les radios ? Le quarté de tête du trimestre est socialiste : au top, Stéphane Le Foll avec huit interviews, puis Myriam El Khomri, Michel Sapin et Bruno Le Roux avec, chacun, sept interviews.

C’est un quarté technicien sans véritable poids politique, ni aura dans l’opinion, un quarté de fidèles de François Hollande depuis longtemps ou de novices qui lui doivent tout, un quarté qui a bénéficié, ce trimestre, des temps d’antenne les plus longs, mais qui n’imprime pas chez les Français.

Dit avec encore plus de lucidité ou de cruauté, le pouvoir subit deux crises majeures et n’a sous la main, pour défendre sa politique, que quatre porte-parole qui, à l’exception de Stéphane Le Foll, sont sans épaisseur et ne suscitent ni envie, ni respect. Problème supplémentaire pour Stéphane Le Foll : en plus d’être porte-parole du Gouvernement, il doit affronter, en parallèle, une crise qui dure depuis des décennies et où on le laisse bien seul, la crise agricole.

A droite, de vieux routiers de la politique

Chez Les Républicains, on trouve en tête les grands vainqueurs des régionales de décembre 2015, quelques individualités plus fortes, mais aussi et surtout des vieux routiers de la politique.

Valérie Pécresse, nouvelle présidente de l’Ile-de-France, et Bruno Retailleau, nouveau président des Pays de la Loire, mais aussi président du Groupe des Républicains au Sénat, gagnent en visibilité radiophonique avec, chacun, six interviews. Ils sont suivis par Xavier Bertrand, nouveau président des Hauts de France, Luc Chatel, nouveau président du Conseil national des Républicains, et Jean-François Copé, qui est bien seul à croire à son come-back, à son livre et à sa candidature à la primaire de la droite. Ils comptabilisent, chacun, cinq interviews. Avec eux, on est déjà dans les vieux routiers, catégorie dans laquelle figurent aussi Nathalie Kosciusko-Morizet, Rachida Dati, Jean-Pierre Raffarin et Gérard Larcher (4 interviews chacun).

La catégorie du vieux routier convient aussi à l’électron libre de la vie politique française, celui qui attend que la Providence l’appelle et qui, en attendant, incarne le centre : François Bayrou. Il a son rond de serviette dans plusieurs radios et totalise ainsi six interviews du matin au 1er trimestre 2016.

Bipartisme le matin à la radio

Quand on considère l’ensemble des 262 interviews du matin dont les invités étaient des politiques français, on a l’impression (trompeuse) d’un retour au bipartisme. Sur l’ensemble du trimestre, le Parti Socialiste et Les Républicains totalisent respectivement 42% et 37% des interviews du matin. Soit, en cumulé, 79% des interviews d’acteurs politiques français pendant les matinales des radios nationales.

Le troisième ensemble politique en nombre d’interviews est absent du top des invités de ce trimestre. Il réunit les différentes obédiences écologistes avec, en cumulé, vingt interviews : principalement, de nouveaux ministres et des « anciens », à savoir Emmanuelle Cosse, Jean-Vincent Placé Daniel Cohn-Bendit et José Bové (3 interviews chacun). C’est la prime à la zizanie. Et encore, il manque quelques têtes d’affiche. Cécile Duflot n’a ainsi donné aucune interview du matin au 1er trimestre 2016, alors qu’elle en avait donné six au 4ème trimestre 2015.

FN, l’effacement radiophonique

Et le Front National ? Au-delà de sa présidente qui a choisi l’abstinence, ce parti a quasiment disparu des interviews du matin au 1er trimestre 2016. Florian Philippot, son porte-parole médiatique attitré, était au top des invités du matin fin 2015 avec un score impressionnant de douze interviews. Il en réalise seulement quatre au 1er trimestre 2016. Gilbert Collard recule lui aussi et passe de quatre à une interview ce trimestre.

Le FN arrive en 4ème position avec douze interviews, soit 5% des interviews de politiques français. Est-ce une volonté du FN de s’effacer ? Est-ce une volonté des radios de l’occulter ? Ou est-ce une lassitude des radios face à un parti qui centralise sa parole médiatique ? Une chose est certaine : le silence médiatique profite au FN, il conforte le positionnement antisystème ou hors système du parti. A date, les procédures judiciaires en France et les panama papers des amis de Marine Le Pen glissent sur l’opinion.

Un truc qui ne tourne pas rond

Au final, ce top des invités du matin à la radio n’est, bien sûr, qu’un reflet très partiel de la réalité médiatique. Mais comment ne pas être interpelé par la primauté des invités politiques (23 invités sur les 26 du classement et 63% des 432 interviews du matin au 1er trimestre), par l’écrasante majorité des hommes (21 invités sur 26 et 79% des 432 interviews du matin) ou par le maintien du bipartisme à la radio (21 invités sur les 23 politiques du classement et 79% des 262 interviews politiques du matin) ?

Au-delà de ces éléments quantitatifs, à un moment où la France traverse plusieurs crises et se déchire sur des projets de réforme, à un moment où les Français demandent un ré-enchantement de la politique et un renouvellement de ses acteurs, comment ne pas être interpelé, aussi, par le fait que les personnes les plus souvent invitées le matin sont, pour beaucoup, démonétisées, technocratiques et sans relief et/ou des vieux routiers de la politique ? S’il y a un truc qui ne tourne pas rond dans la scène politique française, il y a sûrement, aussi, un truc qui ne tourne pas rond dans le reflet que renvoient de cette scène les radios nationales dans le choix de leurs invités du matin.

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