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Présidentielle US: les positions auto-contreréalisatrices de la presse contre Donald Trump

Dernière actualisation : 29/09/2015, 18:53

Les primaires battent leur plein outre atlantique. Dans ce grand remue-ménage politique auquel se livre la plus grande démocratie du monde, la presse innove, propose des abords différents et inédits, mais prend aussi parfois position. Donald J. Trump, l’un des principaux candidats à l’investiture républicaine fut sous le feu incessant des critiques d’une partie importante de la presse jusqu’au mois de septembre. Et pourtant, plus il fut attaqué, plus sa candidature progressait. Première analyse de l’effet auto-contreréalisateur des prises de position de la presse.

Donald Trump : Cible explicite de la presse progressiste

La presse américaine déverse régulièrement à l’encontre du multimilliardaire un flot de détails et d’attaques. Disons-le, la plupart de ces attaques ne sont pas sans fondement : l’homme d’affaire fraîchement engagé en politique a décidé de tenir une position démagogique voir populiste, incarnant une forme d’ultra-conservatisme à géométrie variable, sans qu’une ligne idéologique ne semble fondatrice de ses positions. Donald Trump joue avec brio et savoir faire le rôle d’un monsieur plus de la politique américaine.

Vous aimeriez des baisses d’impôts ? Lui propose de supprimer l’impôt pour des millions de contribuables. Vous en avez marre de la guerre ? Lui imagine carrément laisser les clefs de la résolution des conflits moyens orientaux à Vladimir Poutine. Vous rêvez d’un mur entre le Mexique et les USA ? Lui promet un mur géant. L’ensemble de ces positions partagent le point commun de la caricature, et ne disent au fond pas grand-chose de ce que serait l’exerce de Donald Trump à la Maison Blanche.

Reconnaissons tout de même, spécifiquement en ce moment en France, la force d’une presse américaine qui ne plie pas devant la puissance financière que Trump représente : le new-yorkais dit avoir investi un milliard de dollars dans sa campagne. 

La presse ne retient pas ses coups contre Trump.

Le Time, le New Yorker, le New York Times, le Washington Post et même The Economist n’hésitent pas à mettre leurs attaques contre Trump à la une. Cette presse, identifiée il est vrai à gauche de l’échiquier, porte des attaques fouillées et féroces contre le candidat. Le Time a par exemple depuis le mois d’avril expliqué longuement pourquoi Donald Trump ne pouvait pas gagner les primaires républicaines. Récemment, Time a consacré une couverture, et un espace web entier au candidat. On y lit notamment:

"This is a game like any other, with rules honed over decades by the pros in blue blazers clutching focus-group results: Be likable. Don’t make enemies. Respect the party elders. Avoid funny hats. […]The rules have changed. He didn’t need it.”

La présentation est sans concession, et le reste du dossier l’est encore moins.

Le très progressiste et réservé aux branchés new-yorkais New Yorker fait encore moins dans la dentelle : "Trump is now running for President of the United States. His platform appears, in the early stages, to be a smelly soup of billionaire populism and yahoo nationalism—all flavored with a tangy dollop of old-timey racism.” Difficile d’écrire une offensive plus explicite.

Mais, rien ne marche, Trump semble, malgré des petits ralentissements çà et là, propulsé vers la victoire. Pourquoi ?

La relation ambigue de l'opinion à la presse

A la fois aimante, l’opinion des démocraties conserve une méfiance et de l’animosité envers la presse. Cette méfiance se nourrit de l’incompréhension des événements, de la répétition des mauvaises nouvelles, de l’impression parfois fondée que les hommes de pouvoirs et de presse frayent ensemble, et surtout, que la presse a le pouvoir de manipuler l’opinion. Le citoyen est alors partagé entre deux perceptions de la presse : d’un côté une forte confiance en une presse indépendante et sans concession, et de l’autre côté, une inquiétude de ce que cette même presse pourrait lui faire subir : le citoyen expérimente une ce que certains ont décrit comme une position schizo-paranoïde.

La tendance paranoïde de l’opinion aux Etats Unis est bien connue. « Truth is out there » (la vérité est ailleurs) était le sous-titre d’une des série TV les plus vue aux USA qui revient bientôt sur les écrans.

Aussi, lorsque la presse, et en particulier celle qui porte le plus d’aura et de respectabilité, se met unanimement à désigner un personnage publique comme le danger, l’opinion peut activer un reflexe paranoïde.

Et c’est précisément lorsque ce ressort de l’opinion s’allume, qu’un populiste peut tout remporter sur son passage, notamment en ouvrant des débats sur des thèmes existentiels, tels que l’identité et l’immigration : "Trump has succeeded in unleashing an old gene in American politics—the crude tribalism that Richard Hofstadter named “the paranoid style”—and, over the summer, it replicated like a runaway mutation.“

Plus la presse attaque Trump, plus elle renforce la suspicion paranoïde à son propre endroit, et plus elle renforce la voix de Trump aux oreilles des citoyens inquiets : le cercle vicieux qui lie populisme à paranoïa est enclenché.

Mais que faire ? Faut-il que les journalistes citoyens laissent glisser leur société dans les mains de quelqu’un qu’ils craignent ? Cette question, nous le savons, est également omniprésente dans le débat en France.

Trump profite aux démocrates

Enfin, pour ajouter de la paranoïa à la paranoïa, on ne peut pas totalement exclure l’idée que la presse plutôt démocrate joue Trump contre Jeb Bush. Il semble en effet que l’homme de l’immobilier soit le meilleur adversaire que pourrait trouver face à lui un candidat démocrate. En effet, que ce soit Joe Biden – qui se fait désirer – ou Hillary Clinton, ils pourront alors collecter les voix des swing-citizen, électeurs indécis plutôt centristes. Car si Jeb Bush ou Carly Fiorina peuvent prétendre à rassembler la nation autour de leurs personnes, Trump ne laisse personne indifférent et peut faire fuir les conservateurs modérés.

L’analyse paranoïde d’une campagne électorale nuit-elle à la démocratie ? Nous espérons que non.

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