Novembre 2015 aurait dû être la dernière ligne droite avant la COP21 dans une France se préparant aux élections régionales sur fond de défaite annoncée du PS et de victoire redoutée du FN. Bref, un mois à la fois vert et sans suspense. Il y eut l’horreur des attentats. Il y eut donc un avant- et un après-13 novembre dans le choix des invités du matin à Europe 1, France Info, France Inter, RMC et RTL.
Politics as usual, avant le 13 novembre
Jusqu’au 13 novembre, l’actualité était politique, climatique et ronronnante. Le 3 novembre, François Hollande renouvelait sur Europe 1 l’interview matinale qu’il avait donnée le 19 octobre sur RTL. Le 4 novembre, Nicolas Sarkozy occupait le terrain face à François Hollande en étant l’invité du matin sur RTL.
Le 5 novembre, Myriam El Khomry connaissait, sur RMC, un accident industriel face à Jean-Jacques Bourdin qui l’interrogeait sur les règles s’appliquant aux CDD. Bernard Cazeneuve avait le temps d’être invité deux fois en trois jours, les 4 et 6 novembre. Et les radios avaient le temps d’inviter deux fois Najat Vallaud-Belkacem pour parler d’une nouvelle réforme de l’école (carte scolaire, qui s’en souvient ?).
Enfin, Emmanuel Macron retrouvait le chemin des radios du matin : après une période d’abstinence de plusieurs mois, il était l’invité de toute la matinale de Europe 1 le 10 novembre.
Têtes de file et nouveaux visages après les attentats
Dans la nuit du 13 au 14 novembre, la France a basculé dans l’état d’urgence. Comme en janvier 2015, allocutions et discours pour François Hollande depuis l’Elysée, le Congrès à Versailles, la cour des Invalides… Et comme en janvier, Manuel Valls se charge de prolonger le discours présidentiel dans les studios de radio et de télévision. Le Premier Ministre sera, les 16 et 17 novembre, l’invité du matin de RTL et de France Inter.
De nouveaux visages font leur apparition : imams, magistrats (dont le juge Marc Trevidic), policiers (DGPN, BRI, anciens comme Bernard Squarcini) ou le PDG de Securitas. Alain Juppé, François Fillon, Bruno Le Maire et Christiane Taubira sont, chacun, sollicités deux fois pour une interview du matin. Bruno Cazeneuve, omniprésent sur le terrain, ne trouvera, lui, le temps que pour une seule interview.
Des politiques qui avaient été invités comme candidats aux régionales avant le 13 novembre, sont invités, à nouveau, pour faire entendre la voix de leur parti suite aux attentats. C’est notamment le cas de Florian Philippot, Marion Maréchal Le Pen, Nicolas Dupont-Aignan et Claude Bartolone.
Forte présence des politiques sur l’ensemble de novembre
Lorsqu’on considère les 135 invités du matin sur l’ensemble du mois de novembre, on constate un léger mieux pour les femmes (24% en novembre après le creux d’octobre à 18%) et, surtout, une très forte présence des politiques (71% des invités du matin en novembre), au détriment des syndicats, des acteurs culturels, des avocats et des témoins – quatre catégories qui reculent par rapport à octobre.
Les invités internationaux sont toujours aussi peu nombreux. Signalons trois interviews de chefs d’Etat ou de Gouvernement : l’iranien Hassan Rohani à la veille d’une visite qui sera annulée suite aux attentats, le canadien Justin Trudeau et le sénégalais Macky Sall à la veille de la COP21. L’Union Européenne continue d’être absente, à l’exception de l’interview mensuelle de Pierre Moscovici (c’était RTL en novembre, après Europe 1 en octobre).
Au top en novembre : Florian Philippot
L’actualité terroriste, climatique et régionale a obligé les radios à diversifier un peu leurs invités en novembre. Ce mois-ci, 35% des 135 créneaux du matin étaient occupés par des personnes qui ont été invitées au moins deux fois, contre 44% en octobre et 41% en septembre.
Au top en novembre, Florian Philippot avec quatre interviews du matin grâce à sa double casquette de Vice-Président du FN et de tête de liste dans le Grand Est aux élections régionales : deux interviews avant le 13 novembre et deux interviews après le 13 novembre. A noter que celui qui occupait le top du classement en octobre a disparu des invités du matin en novembre. Pour mémoire, il s’agissait de Pierre de Saintignon, tête de liste du PS pour Nord-Pas de Calais-Picardie. La messe est dite. Ses deux grands rivaux dans cette région, Marine Le Pen et Xavier Bertrand, ont, chacun, été invités deux fois en novembre.
Au classement de novembre, suivent, avec trois interviews chacun, Bernard Cazeneuve, Nicolas Dupont-Aignan, Laurent Fabius, François Fillon et Nathalie Kosciusko-Morizet. François Fillon continue de creuser le sillon de son livre « Faire ». Il était déjà invité trois fois en octobre et deux fois en septembre.
Au FN, cumul des interviews par 4 porte-parole
La palette des invités politiques français est plus équilibrée en novembre qu’en octobre. Les invités républicains et socialistes représentaient, chacun, 36% des invités politiques français en novembre. Ils représentaient respectivement 32% et 46% en octobre. Après un creux à 5% en octobre, le FN totalise en novembre 10% des invités politiques français dans les matinales. Certains trouveront que 10%, c’est peu pour un parti qui fait la course en tête dans plusieurs régions et d’autres trouveront que 10%, c’est beaucoup pour un parti populiste aux racines xénophobes et qui compte, à date, très peu d’élus.
Autre chose interpelle : le discours du FN dans les médias nationaux est porté par un nombre très réduit de porte-parole qui cumulent les interviews. Au cours des trois derniers mois, les vingt interviews matinales du FN à la radio ont ainsi été réalisées par seulement cinq personnes : Marine Le Pen (7 interviews), Florian Philippot (6), Marion Maréchal Le Pen (3), Gilbert Collard (3) et Wallerand de Saint-Just (1).
Alors, autolimitation des radios aux têtes d’affiches ou volonté du FN de contrôler sa parole publique ?
Les interviews du matin sur Europe 1, France Info, France Inter, RMC et RTL sont, du lundi au vendredi, des rendez-vous médiatiques importants (essentiels pour ceux qui aspirent à y être invités). Les interviewers sont des personnalités connues qui, pour certaines, occupent ce créneau depuis longtemps : Thomas Sotto et Jean-Pierre Elkabbach, Jean-François Achilli, Léa Salamé et Patrick Cohen, Jean-Jacques Bourdin, Olivier Mazerolle. L’Observatoire des Invités du Matin s’intéresse, chaque mois, à leurs choix. Ces journalistes ont, en cumulé, environ 140 créneaux à remplir par mois. Qui choisissent-ils d’inviter ? Qu’est-ce qui ressort de leurs choix ?
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