On sort du tunnel politique des régionales. Cela se sent dans le choix des personnes que les radios invitent pour leurs interviews du matin. Moins de têtes d’affiches, moins d’invités politiques, plus d’invités du monde de la culture, de l’entreprise et des syndicats, mais aussi plus d’experts, plus de hauts fonctionnaires. En un mot, un peu de diversité ! Ne nous emballons pas : le politique reste majoritaire avec 58% des 137 créneaux qui étaient à remplir en janvier 2016 pour les interviews du matin sur Europe 1, France Info, France Inter, RMC et RTL. En même temps, 58%, c’est sensiblement inférieur à la part des politiques dans les interviews du matin en décembre (69%) et en novembre (71%).
Absence des têtes d’affiche en janvier
En décembre, on avait atteint des sommets dans le choix des invités avec 9 acteurs politiques interviewés au moins 3 fois, dont 7 interviews de Florian Philippot, 5 interviews de Manuel Valls et 4 interviews de Nicolas Sarkozy. En janvier, aucune de ces trois têtes d’affiche n’a été interviewée le matin et personne n’a été interviewé plus de 3 fois. Seuls quatre invités du matin ont été interviewés 3 fois : François Fillon, François Bayrou, Fleur Pellerin et Philippe Martinez.
L’ancien Premier Ministre creuse son sillon dans les matinales des radios, à défaut d’augmenter les intentions de vote en sa faveur à la primaire de la droite et du centre. Le Président du MODEM, mis entre parenthèses face à la menace du FN aux régionales, retrouve sa posture préférée de commentateur qui distribue bons et mauvais points. La Ministre de la Culture, absente des interviews du matin au 4ème trimestre 2015, se rappelle à notre bon souvenir sur fond de rumeurs qui la donnent dehors au prochain remaniement. Enfin, le secrétaire général de la CGT poursuit son échappée, loin devant les autres représentants syndicaux (salariés et patronat), probablement grâce à ses oppositions radicales.
Retour au bipartisme, comme si le FN avait disparu
En janvier, c’est un peu moins d’invités politiques que d’habitude, c’est aussi le retour à un paysage politique bipolaire où le FN a quasiment disparu des interviews des matinales avec seulement 3% des créneaux, contre 15% en décembre. Florian Philippot qui a cumulé 12 interviews du matin au 4ème trimestre 2015 était-il en vacances en janvier ? Le soulagement de la défaite du FN aux régionales ferait-il oublier que le FN est très haut dans les sondages et que le bipartisme traditionnel a vécu ? A suivre en février… Une chose est certaine : ce n’est pas en oubliant le FN qu’on le fait reculer.
Retour du bipartisme à la radio. Socialistes et Républicains ont représenté, ensemble, près de 82% des invités politiques français en janvier. Les seuls qui tirent leur épingle du jeu sont les écologistes avec 7% des interviews des matinales, mais il est vrai que leurs différentes chapelles donnent matière à de multiples invitations.
Plusieurs régions oubliées, comme en fin 2015
Après les élections régionales, place aux nouveaux présidents des régions : au total, neuf interviews matinales en janvier. Deux interviews pour le Nord et l’Ile-de-France. Une interview pour PACA, l’Auvergne Rhône Alpes (ARA ?), la Corse, les Pays de la Loire (mais le président de région est aussi président du groupe LR au Sénat) et la Bretagne (mais le président de région est aussi Ministre de la Défense). Plusieurs régions manquent toujours à l’appel, comme si elles n’existaient pas pour les radios nationales.
Du côté des politiques, signalons encore, en janvier, l’hommage posthume de Jean-Pierre Elkabbach à François Mitterrand, le recours à plusieurs anciens ministres (Tony Blair, José Bové, Frédéric Mitterrand, Hubert Védrine…), le « come-back » d’Aurélie Filippetti et de Jean-François Copé (2 interviews chacun), ainsi que le traitement VIP d’Alain Juppé qui fut l’invité d’une matinale entière de Europe 1, à savoir une interview par Thomas Sotto, suivie d’une interview par Jean-Pierre Elkabbach (traitement réservé, fin 2015, à Manuel Valls, Nicolas Sarkozy et Emmanuel Macron).
Légère embellie, sauf pour les femmes et les étrangers
L’entreprise et la culture font jeu égal en janvier avec 12 interviews chacun. Elles sont suivies par les experts (10 interviews), les syndicats (8) et les hauts fonctionnaires (7). C’est une légère embellie qui permet de découvrir de nouvelles personnalités.
Le panel culturel est d’une grande diversité, depuis Marianne Faithfull invitée pour évoquer David Bowie jusqu’à Marie Desplechin invitée pour son soutien à une primaire à gauche ou Jérémy Ferrari invité pour son interpellation de Manuel Valls dans l’émission de Laurent Ruquier. Les intellectuels sont les plus nombreux. Ils incluent deux Immortels : Alain Finkielkraut et Jean d’Ormesson.
Les autres catégories sont, elles aussi, sous le signe d’une grande diversité : pétrole, aviation, édition, cinéma, start-up… pour les entreprises ; économie, islam, climat, intelligence artificielle… pour les experts ; armée, justice, Banque de France, Observatoire de la Laïcité… pour les hauts fonctionnaires. Signalons, ici, les deux interviews de Thierry Breton, PDG d’Atos qui fut Ministre de l’Economie dans une vie antérieure.
Toutefois, la légère embellie ne concerne ni les femmes, ni les personnalités étrangères. En janvier, elles représentent respectivement 22% et 5% des interviews des matinales. La Commission Européenne plafonne toujours à une interview par mois. La nouveauté de janvier, c’est que l’invité du mois n’est pas Pierre Moscovici, mais Frans Timmermans, le 1er Vice-Président de la Commission. C’est RTL qui a pris cette initiative. Souhaitons qu’elle soit renouvelée. Il y a, en tout, 28 Commissaires européens.
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